jeudi 20 novembre 2014

Paye Ton Utérus

Cette semaine sur Twitter, voici le HT à ne pas manquer: #PayeTonUtérus , lancé par OndineOndée Jeune, bloggeuse, twitteuse et "pharmacienne en carton chez Leclerc" (c'est pas moi qui l'ai dit. :o) ).

Ce HT (comprenez hashtag) a été pris d'assaut par une masse affolante de femmes cis / hommes trans / personnes non-binaires pour raconter leur expérience gynécologique, et ça fait froid dans le dos.





Entre maladresses, sexisme, hétéro/cis centrisme (homophobie, même), racisme, fat shaming, slut shaming, et j'en passe, ce que révèle ces tweet montre une face de la gynécologie dont on n'ose pas parler, que l'on tait car d'un côté il y a la honte, la soumission (après tout c'est un médecin, il sait ce qu'il dit - le pouvoir de la figure d'autorité, vous vous rappelez), et surtout parce que parler de son utérus et de ce qui l'entoure, c'est encore un tabou à garder sous silence, on ne parle pas de ces choses-là voyons.

Ca a été dit, Twitter n'est pas forcément l'endroit pour parler de ça. Mais dans un monde ou l'on passe sous silence ce qui tourne autour sexe féminin (qu'il soit porté par une femme, un homme ou une personne non binaire, je tiens à le préciser vu qu'il est encore difficile par certains d'imprimer que les personnes de genre féminin ne sont pas les seules à porter un appareil génital féminin), difficile de trouver le "bon endroit" et le "bon moment", quand même le corps médical ne garantis pas un espace de sécurité.

Comme l'explique Morgan dans ce billet: "#Paye Ton Utérus, quand Twitter ose parler de l'intime qui fâche":

"5) Ce qui me fait comprendre quelque chose d’assez désagréable : les F cis, H trans et personnes non-binaires n’ont pas d’espace de discussion safe où échanger sur ce genre de sujets. Et restent donc entouré(e)s d’ignorance, de préjugés et de ouï-dires aux origines parfois douteuses.
Beaucoup supportent depuis des années des situations totalement anormales en croyant que c’est la fatalité. D’autres pensent être bizarres alors que leur situation est parfaitement naturelle. Certain(e)s découvrent à l’occasion que les règles ne sont pas nécessaires (non, on n’a pas besoin d ‘être vidangé(e)s !!), que les règles de pilules sont de fausses règles et qu’il est parfaitement possible et sans risque de prendre une pilule en continue.
Il y a ceux/celles qui souffrent depuis des années à qui les médecins disent d’arrêter de faire leur douillette alors qu’ielles se trimbalent une endométriose qui devrait être prise en charge depuis longtemps. Etc., etc., etc.
Cet après-midi, des twittos ont pris la parole et ont osé dire tout haut ce qu’ielles vivaient. On peut se demander si Twitter est le lieu pour ça. Non, sans doute pas, mais où alors ? Ielles devraient pouvoir se fier à des médecins compréhensifs, ouverts et attentionnés qui mettent à leur disposition toutes les infos nécessaires, sans jugement ni question inappropriée. Ce n’est à l’évidence pas le cas à tous les coups, loin s’en faut."



Ce HT, je le vois comme une formidable aubaine pour se faire entendre et pointer le doigt sur des problèmes dont on parle peu ou pas. C'est une occasion de soulever de vieux tabous. Il va permettre entre autres choses d'avancer sur le terrain de la connaissance et permettre à ces femmes / hommes trans / personnes non binaires de partager un soutien moral et pourquoi pas permettre l'émergence d'une liste de gynécologues safes.
Et vu que je suis une utopiste, pourquoi pas permettre de changer la donne du côté du corps médical, permettre que les pratiques invasives et humiliantes cessent.

Vous ne pensez pas que cela puisse être aussi térrible? Quelques exemples:

- http://sous-la-blouse.blogspot.fr/2011/06/tu-sauras-jamais.html
http://www.lexpress.fr/actualite/societe/sante/le-douloureux-point-du-mari-pour-un-vagin-de-jeune-fille-apres-l-accouchement_1503176.html
- http://www.monblogdefille.com/blog/florilege-des-positions-humiliantes-imposees-a-la-femme-du-xxieme-siecle



Un examen gynécologique peut déjà être en soi une source d'angoisse, on touche à l'intime, c'est pas rien, le minimum est quand même de faire en sorte que les choses se passent le plus respectueusement et le plus agréablement possible.
De même qu'il est complètement absurde de juger les femmes qui comme moi ont décidé de ne pas y passer.



Car oui, j'y vais de mon petit coup de gueule parce qu'on m'a déjà regardé avec effroi quand je dis que je n'ai jamais vu un gynécologue et que je ne prend aucun moyen de contraception. Sans savoir que l'idée qu'une personne étrangère me touche et pose un regard - même purement médical - sur mon corps m'angoisse au plus haut point, et que contraception ou pas, ma vie sexuelle me permet de ne reposer que sur l'utilisation de préservatifs.
Juger sans savoir, à croire que c'est le propre de l'humain.  

Ceux qui me connaissent un peu savent que je passe 90% de mon temps à questionner ma personne, je cherche sans cesse des réponses, des pistes, et récemment j'ai entendu parler de la "zone grise", entre asexualité et sexualité très rare, je me suis assez reconnue là dedans. Je ne suis pas asexuelle, mais mon intérêt pour les choses sexuelles est vraiment très limité, donc: vie sexuelle...  pas un truc après lequel je cours, ça a même tendance à me dégouter les trois quart du temps.
Je suis pas certaine de pouvoir affirmer être dans la zone grise, ma réflexion n'est pas terminée sur ce sujet, mais je constate simplement que ça semblerait logique.
Et je m'en veux un peu d'avoir eu honte de ne pas l'avouer - me l'avouer - plus tôt, dans un monde où le sexe et la performance sexuelle est normale, même plus que normale, obligatoire, j'en avais honte, tout bêtement. Souvent j'ai fait croire que j'avais une vie sexuelle "normale" alors que j'ai en fait eu mon premier rapport à 23 ans (y'a trois ans, donc, c'est bien tu sais compter).
T'as pas une vie sexuelle active = gros.se nul.le; ou quand on vous sort toute les cinq minutes que "ne pas aimer le sexe, c'est pas normal", "c'est parce que t'as pas trouvé le bon", "j'ai de la peine pour toi, tu sais pas ce que tu rates"...
Comment dans ces conditions on peut se sentir assez safe pour dire "ouais non mais moi, le sexe c'est pas trop mon truc et d'ailleurs j'ai pas une vie sexuelle super active, hein...", a fortiori si comme moi vous avez été élevé dans une famille dans laquelle on ne parle absolument JAMAIS de ça.


Mais le fait que - pour revenir à nos moutons - je n'ai pas nécessairement besoin (ni envie) de bousiller mon corps a coup de détraquage d'hormones juste parce que je suis sensée avoir une vie sexuelle active.
De plus, la contraception est un outil devant permettre aux femmes - j'entends aussi hommes trans et personnes non binaires, je vais peut-être pas le répéter à chaque fois - d'avoir un contrôle sur leur corps en ce qui concerne la procréation.
C'est une bonne chose, vraiment, je ne reviens absolument pas là-dessus. Mais tout comme chacun devrait pouvoir choisir de ne pas faire d'enfants surprise, chacun devrait aussi avoir le droit de décider de laisser la nature faire sa life aussi.

Nodoka me posait justement une question concernant le désir et non-désir de maternité ce matin, comme je le lui ai répondu alors, je ne veux pas d'enfants aujourd'hui, la situation et mon état d'esprit ne s'y prêtent pas. Mais paradoxalement, je n'ai pas envie de contrôler ça. Si un enfant doit un jour sortir de mon utérus, il en sortira, à moins qu'il n'ait été conçu dans la douleur.
A l'heure ou on dénonce "l'avortement de confort", je me sens presque anormale de dire ça. Mais oui, je préfère avorter si besoin est plutôt que de prendre un moyen de contraception qui peut me bousiller de l'intérieur.
Et je rappelle que ma vie sexuelle.... walou, sans doute que mon positionnement serait différent si j'avais une vie sexuelle active, mais c'est pas le cas.

Pour faire simple: mon corps, ma vie, mon choix, arrêtez cinq minutes de juger une personne qui vous dit qu'elle ne prend pas de contraception féminine pas plus qu'une personne qui vous dit qu'elle ne veut pas d'un examen gynécologique inutile.



Notre corps à tous n'est uniquement sous le contrôle que de l'esprit qui l'habite, et de personne d'autre. Et sachez que vous pouvez dire non, ouvrir votre gueule et refuser des pratiques gynécologiques que vous jugerez invasives, et grâce à ce HT, nous avons l'opportunité de comprendre et d'avancer.
 Donc à toutes les personnes qui s'incrustent uniquement pour dire que ces twittos "exagèrent", "oublient le mal des hommes", "sont injustes envers le corps médical", etc, profitez-en pour ouvrir vos yeux, votre coeur, votre esprit afin de comprendre ce que vivent des milliers de femmes chaque jour.
Que vos intentions soient portées sous une bannière intitulée "respect".





Rappel → #PayeTonUtérus

Edit:
je vous rajoute des liens:
- http://www.europe1.fr/societe/payetonuterus-les-dessous-d-un-buzz-2295243
- Storify - Paye Ton Utérus par Ondine

- http://madame.lefigaro.fr/societe/payetonuterus-revelateur-des-miseres-gynecologiques-211114-82745 
- https://gynandco.wordpress.com/liste-des-soignantes/

10 commentaires:

  1. Je savais qu'il y avait pas mal de gynéco et autres médecins pas safe, mais ce HT m'a fait halluciné, je n'imaginais pas que c'était aussi courant.
    Du coup si un jours je dois aller voir un-e gynéco ce sera uniquement en cas de pépin ou de grossesse, mais jamais avant, surtout que j'aime pas vraiment l'idée de me faire ausculter les parties et de me faire potentiellement mal traiter à cause de mon identité de genre. Et puis n'ayant pas une vie sexuelle active la contraception j'y pense même pas, j'ai failli avoir recourt à la pilule à cause de mes règles douloureuses mais finalement j'ai un traitement anti-douleur efficace qui m'évite ça (ouf!).

    Bref, monde de merde.

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  2. Ahlala le gynéco. Ma mère est très douillette et elle en as une au top, comme quoi, le bouche-à-oreille prévaut dans ce domaine, c'est une gynéco adepte des méthodes de contraception dites "naturelles" absolues contre les hormones de synthéses et co.
    Je pense que si elle était tombé sur un con pendant un exam gynécologique, elle lui aurait mit une patate dans le nez. Et encore, celui qu'elle avait au moment ou elle a accouché de mon frère, il lui a dit qu'elle ferait mieux de pas faire d'autre enfant à cause de ses jambes ( problèmes de circulation sanguine, héritage familial toussa ), Eh conno t'es gynéco ou endocrinologue !??? Bref, il avait tort et ma mère à toujours regretté de l'avoir écouté.

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  3. Au fait, je viens de me souvenir qu'on m'avait fait passer une liste vers des gynéco safes : http://gynandco.wordpress.com/

    On m'avait aussi passé une liste de psy LGBT+ friendly, mais je le retrouve plus, en plus y'en avait un sur Montpellier ! ><

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  4. J'ai retrouvé !

    http://bddtrans.theilax.com/viewinfo.php?p=3

    Voila ! Désolé pour le spam. XD

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  5. Article intéressant.

    Déjà, il faut se méfier des buzz qu'on trouve sur internet, qui font de cas isolés une norme.

    Ensuite, on ne va pas chez le gynécologue que pour faire suivre sa contraception. On va aussi chez le gynécologue dans un but de prévention, pour le dépistage d'éventuels cancers. Ne pas y aller, c'est en effet un choix. Mais c'est sa vie que l'on risque.

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    1. C'est tout sauf "un cas isolé", je pense que si tu avais suivit l'affaire dans la presse tu en aurais une vague idée.

      Mais oui, je vais mourir dans d'atroces souffrances parce que j'ai fait le choix de ne me faire suivre par un médecin seulement quand c'est nécessaire. *soupirs*

      " on ne va pas chez le gynécologue que pour faire suivre sa contraception"
      Merci, Captain Obvious, juste cite moi le moment où j'ai dit que c'était le cas? Tu devrais vraiment suivre les liens que je fournis - a fortiori suivre le lien vers les tweets en question - avant de dire des âneries, franchement, tu aurai vu qu'il ne s'agit pas que de ça.

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    2. C'est vrai qu'au cours de l'histoire et ce depuis l'aube de la civilisation les femmes sont très souvents mortes de problèmes liés à leur utérus parce qu'elles ne faisait pas de suivit gynécologique.

      .... AUSEKOUR ! O__________________________________________O

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  6. sympa l'article.

    Mais niquay saybieng, sinon. Faut envisager ça comme une autre façon de connaître une personne, pas juste sous l'angle sentimental ou sesquel, c'est un ensemble de choses qui font passer un moment spécial avec autrui... Enfin je cherche pas à convertir les gens heing :)

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    1. Bah ça dépend pour qui, dans le spectre très large de la sessoualitay, y'a des gens aromantiques et des gens asexuels (ou les deux), et ils vont très bien, le sexe et/ou l'aspect romantique d'une relation ça peut être génial pour les uns et sans intérêt pour les autres, mais y'a pas une vision des choses meilleure qu'une autre, comme tu t'en doute. ^^

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