jeudi 27 février 2014

Un animal n'est pas un meuble!

Aujourd'hui je voudrais vous parler d'un sujet qui me tiens à coeur: les animaux. Et plus particulièrement le statut juridique de l'animal.




Le statut juridique de l'animal actuellement


Selon les textes de loi du Code Civil, il n'existe que deux régimes: les personnes et les biens. L'animal entre dans le régime des biens, au même titre qu'un meuble. 


Sont meubles par leur nature les animaux et les corps qui peuvent se transporter d'un lieu à un autre, soit qu'ils se meuvent par eux-mêmes, soit qu'ils ne puissent changer de place que par l'effet d'une force étrangère.
Legifrance.fr
Chapitre IV - Protection des animaux / Code Rural


Les animaux n'ont donc pas selon le Code Civil un statut propre qui leur permettrait d'être considérés comme des êtres vivants sentients ayant des droits.
De ce fait, ce manque de considération dans la loi implique qu'ils ne sont pas suffisamment protégés.

Les condamnations sont très faibles voire inexistantes lorsque l'on porte atteinte au bien-être et à l'intégrité d'un animal.

Récemment, vous avez sans doute appris l'histoire du chaton Oscar, à Marseille au début février 2014, violemment maltraité par un jeune homme qui a admis avoir agit "sans y réfléchir", simplement parce qu'un chaton, c'est pas grave. Vraisemblablement il n'avait pas vu le mal dans le fait de torturer cet animal.

C'est horrible mais juridiquement rien ne lui démontrait qu'un animal pouvait être doué de conscience et capable de souffrir, selon la loi un chaton n'est rien moins que l'égal d'une chaise.

Pour cette affaire-là le jugement à été exemplaire, rare, un jugement nourri par la pression qu’exerçait toutes les personnes qui se sont mobilisées sur internet pour qu'une mesure soit prise.
Sans cette pression, le jeune homme n'aurait écopé que d'une légère remontrance, un doigt levé, "c'est pas bien", affaire suivante.

Car c'est par la mobilisation des internautes que la justice nous donne l'impression d'agir pour le bien des animaux, il est essentiel de franchir un cap et d'accorder aux animaux un statut juridique propre.

Plus d'infos:
- Le Nouvel Obs


Ce que notre président en dit



Lors de sa campagne pour la course à la présidence, François Hollande avait été très éloquent sur le statut juridique des animaux.
Il avait ainsi déclaré en 2012:

« [...] je souhaiterais également, si les Français m'élisent à la présidence de la République, définir un nouveau statut juridique de l'animal qui reflète les vérités scientifiques ainsi que l'évolution de la perception des animaux dans la société. Il me paraît nécessaire de réformer le Code civil afin que ce dernier ne définisse plus l'animal par son utilisation, en tant qu'objet patrimonial, mais bien comme un être sensible. »

Nous avions pensé naïvement qu'après le retentissement de l'affaire Farid de la Morlette,  ces engagements allaient être tenus.

Mais voici que lors du Salon de l'Agriculture ce mois-ci (le 21 février), François Hollande déclare ces mots effarants, en totale contradiction avec la déclaration précédente:

« En France, nous aimons les animaux. Et les premiers qui les aiment ce sont ceux les éleveurs qui les soignent*. Un agriculteur qui maltraiterait son cheptel détruirait son propre patrimoine. A juste raison beaucoup d'efforts ont été réalisés pour le bien-être animal sans qu'il soit nécessaire de le traduire par une loi. Dans le code rural notamment, l'animal est déjà considéré comme un être sensible. Pourquoi ajouter d'autres considérations ? »

 


-------------- Parenthèse ---------------------------------------------------------------------------
* qui les soignent avant de les abattre! Encore une fois nous avons le joyeux mythe de l'éleveur sympathique qui élève "ses bêtes" en plein air, avec amour, avant de les tuer - toujours avec amour -  sans douleur et avec une infinie compassion.

Désolée, l'image est tronquée, je n'ai pas trouvé mieux. Source ici. 

Seulement voilà, si ces éleveurs compatissants existent bel et bien (oui je sais, la tante de votre mère est petite-fille d'éleveur, et "c'était pas comme ça, les animaux étaient heureux!"), reste qu'ils sont une minorité comme le démontre ce graphique L214: 

Source - Huffpost
  Plus de chiffres sur Animal Cross.org.

"Cela ne se passe pas comme ça en France.

Si l'élevage bovin (races à viande notamment) n'est pas encore totalement industrialisé comme il peut l'être aux États-Unis, les pratiques sont loin d'être conformes à l'imagerie bucolique de la publicité. Pour le reste, l'immensité majorité des productions animales française (80 % des poules, 95% des cochons, 99% des lapins) se pratique sur un modèle industriel intensif tout à fait comparable au modèle américain, le seul permettant production et consommation massives et à bas coût."
Vegfaq

---------- / Fin de parenthèse ---------------------------------------------------------------------------

Pour en revenir à cette déclaration, monsieur Hollande fait un amalgame ridicule entre droit civil et droit rural. Ce qu'il dit se résume à ceci: les éleveurs sont gentils avec leurs bêtes et le code rural prévoit la protection des animaux d'élevage, donc pourquoi changer le texte du code civil concernant les animaux domestiques?
C'est un peu comme dire: "la loi interdit déjà le meurtre, pourquoi renforcerions-nous la loi sur le vol à l'étalage?"

D'autant que si l'animal d'élevage avait déjà été reconnu comme être sensible, nous ne les élèverions pas pour notre plaisir culinaire - et l'élevage intensif serait interdit en France, or ce n'est d'évidence pas le cas. Un bœuf à autant de sensibilité pour les éleveurs et au regard de la loi qu'un caillou.


Pourquoi avons-nous cru que la première déclaration n'était pas un mensonge de plus dans la course à la présidence? Une déception de plus, qui une fois de plus génère une indignation de la part du public, défenseur des animaux ou non. Tout le monde est d'accord pour dire qu'une promesse doit être tenue et qu'en l'occurrence un animal de compagnie n'est pas un meuble.



Pour ma part j'étends cette affirmation à l'ensemble des animaux, animaux d'élevages comme animaux dits de compagnie, en passant par les animaux "de divertissement" (zoos, cirques, corrida, courses hippiques, etc) et les animaux sauvages.
Tout animal mérite considération. Il ne s'agit pas d'un outil dont nous pouvons disposer à notre guise sous prétexte qu'ils nous sont "inférieurs".

 Plus d'informations:

- Article L214
- Article Humanité et Biodiversité

Des pétitions nées de l'indignation

Suite à cette déclaration de François Hollande, la mobilisation sur la toile se fait ressentir par le biais d'articles tels que le mien, mais surtout par des pétitions qui circulent visant à rétablir un statut unique de l'animal. 




Au Québec: 

Cela touche également à la sphère du "haut placé", en effet 30 Millions d'Amis à publié un manifeste, de 24 signataires parmi lesquels philosophes, écrivains, scientifiques; tels Michel Onfray, Luc Ferry (philosophes) Eric Orsenna (écrivain et académicien), Hubert Reeves (astrophysicien), Matthieu Ricard (moine bouddhiste et docteur en génétique cellulaire).

Ils se mobilisent conjointement à la pétition et au sondage mis en place par 30 Million d'Amis, sondage qui indique que 90% des Français ayant participé au sondage se disent favorables à un changement du statut juridique de l'animal.


"Interrogés par L’IFOP pour la Fondation 30 Millions d’Amis*, 86% de nos concitoyens trouvent cette assimilation anormale et 9 Français sur 10 se déclarent favorables à une modification du Code civil sur ce point. Un résultat sans appel."

Plus d'infos:

- Le Figaro
- 30 Millions d'Amis 


Conclusion

Il est pour moi élémentaire de redéfinir le statut juridique des animaux - en général et non seulement celui des animaux domestiques.
Songeons que c'est parce que nous ne considérons pas les animaux comme des êtres capables de conscience, de sentiments, que nous en venons à nous servir d'eux pour notre confort, notre plaisir, notre divertissement aussi bien que pour nous nourrir, nous vêtir et pour notre propre bien-être.

La maltraitance d'un animal "de compagnie" est pour moi aussi abjecte que la maltraitance d'un animal d'élevage, de divertissement, de "science" (vivisection).

Mais si nous pouvions commencer par faire accepter l'idée que les animaux communément admis comme "nos amis" (chiens, chats,...) ont une conscience - et de ce fait un statut juridique propre qui les distingue d'un simple meuble inanimé; déjà pour tous ceux qui comme moi ont décidés de mener un mode de vie excluant toute exploitation animale (rappel: je suis en pleine conversion végétalienne / vegan), ce sera une bataille de gagnée dans le respect de la vie.

Car respecter la vie ne se limite pas au respect de la vie des personne de type humain - la vie est une chose globale, elle passe par nous, elle passe par les animaux, elle passe par un respect de l’environnement.
Une vie est une vie, il n'y en a pas qui soit supérieure en valeur à une autre.

Je terminerais cet article sur deux choses.

→ Tout d'abord, cette déclaration émise le 7 juillet 2012 par quelques éminentes figures du monde scientifique - dont le physicien théoricien, cosmologiste et mathématicien britannique Stephen Hawking:

«L’absence de néocortex ne semble pas empêcher un organisme d’éprouver des états affectifs. Des données convergentes indiquent que les animaux non-humains possèdent les substrats neuroanatomiques, neurochimiques et neurophysiologiques des états conscients, ainsi que la capacité de se livrer à des comportements intentionnels. Par conséquent, la force des preuves nous amène à conclure que les humains ne sont pas les seuls à posséder les substrats neurologiques qui produisent la conscience. Les animaux non humains, soit tous les mammifères, les oiseaux, et de nombreuses autres créatures, comme les poulpes, possèdent aussi ces substrats neurologiques»
The Cambridge Declaration of Consciousness - pdf - par Philip Low et révisée par Jaak Panksepp, Diana Reiss, David Edelman, Bruno Van Swinderen, Philip Low et Christof Koch.

Plus d'infos:
- Libération - Les animaux en toute conscience
- Les Cahiers Antispécistes - Déclaration de Cambridge sur la conscience

→ Enfin, cette vidéo d'une interview par BFM story, de l'astrophysicien, communicateur scientifique et écologiste Hubert Reeves, dans laquelle il explique que "les animaux ne sont pas des meubles".



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5 commentaires:

  1. Je pense que changer le statut juridique de l'animal pose problème car ça inciterait les gens à réfléchir sur la condition animale et à probablement se renseigner et changer leur mode de vie/consommation. Selon moi, il doit y avoir des pressions du côté du lobbying aussi...enfin, j'veux pas non plus rentrer dans la paranoïa, huhu.

    Par contre, quand on parle de "bien meuble" ça n'a rien à voir avec les meubles genre chaise ou étagère. En droit, meuble = un bien qui peut se déplacer (animal) ou être déplacé (objet). Mais bon, on peut effectivement faire le rapprochement. ^^

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    1. J'y ai pensé aussi mais le bon point dans tout ça, que pas mal de pessimistes ne voient pas, c'est qu'on est déjà en train d'y réfléchir, les gens commencent déjà à se dire "tiens mais oui au fait, mon petit chat, c'est pas un meuble!", en témoignent les trouzemille articles, groupes fb, photos, etc...
      Mine de rien c'est aussi important.

      Et peut-être qu'au bout d'un moment la pression exercée par les gens sera plus imposante que la pression des lobbyings - je rêve peut-être mais si tout le monde réclame un nouveau statut juridique, les-dits lobbyings n'auront pas d'autre choix que d'accepter s'ils veulent garder la confiance des gens sur lesquels ils misent leurs lobbys.

      Puis oui, je sais que meuble ça veut dire "qui se meut" selon l'étymologie du mot, mais c'est pas tant sur le sens étymologique que sur le sens sous-entendu que "tasse à café, chaise de jardin", tout ça.
      Techniquement un "bien", c'est une chose qui nous appartient, en somme, un objet. D'où le chien/table. ^^

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    2. Un ajout au sujet des lobbys, ça me saute aux yeux après publication, c'est malin. -__-
      Bref, pour donner un exemple à ce que je disait: ça me fait penser à ce dont on parlait avec le gars des clopes électroniques.
      Admettons que 99% de la population mondiale passe à la clope éléctronique, les lobbys du tabac n'auront pas d'autre choix que de s'adapter pour continuer à se faire des thunes, donc ils passeront au lobby des clopes électroniques.
      C'est ultra logique en fait, en exemple plus simple, ça sert à rien de vendre des poires à des gens qui ne mangent que des bananes. ;)

      Donc, un retournement de situation est quand même possible au bout du compte.

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    3. Ouep, on peut prendre comme exemple le greenwashing aussi, les lobby ont vu que l'écologie c'était très "mode" alors ils surfent sur la vague pour continuer à vendre leur merde sous une étiquette faussement nature-bio-écolo. Mais des gens tombent dans le panneau, et c'est pas toujours facile de démêler le vrai du faux.

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    4. Ouais j'ai vu ça avec le Nutella par exemple, c'est clair que c'est un jeu à double tranchant. Pour ce genre de chose ça se passe jamais dans la simplicité et la logique, c'est pour ça que je préfère voir le positif, c'est moins démoralisant. ^^

      Je me dis quand même que pour l'instant rien n'est encore joué, et même s'il y a une chance non négligeable qu'au bout du compte rien ne soit fait concrètement au niveau de la loi, bah pour l'instant, y'a des gens que ça fait réfléchir, qui veulent voir les choses changer.
      Faut se dire aussi, il a aussi une chance que la loi soit modifiée, c'est aussi une possibilité. ^^

      Du coup, là tout de suite, bah je pousse ma gueulante sur mon blog, je signe les pétitions que j'ai listé, même si la décision finale est négative, bah j'aurai ouvert ma gueule, c'est important pour moi.

      Petit HS : J'en ai lu plein qui disaient que signer ces pétitions ça allait servir à rien (déjà ça, on n'en sait rien) et donc ne les signaient pas, c'est leur droit mais je trouve ce raisonnement stupide.
      Les signer c'est aussi un peu se dire "bah c'est pas parce que les choses risquent de ne pas changer que du coup je vais subir, impassible, en ne faisant rien". Les signer, et gueuler un bon coup par d'autres moyens aussi, c'est déjà faire quelque chose, on aura essayé.

      Enfin je trouve dommage cet espèce de fatalisme passif, ce principe de se dire que puisque l'issue peut sur une chance sur deux être défavorable, elle sera forcément défavorable, et que donc faire quelque chose, aussi minimal soit ce quelque chose, ne sert à rien.

      'Fin bref, pour en revenir sur le greenwashing et les coups de pute des lobbyistes, bah la seule défense qu'on ait ça va être d'informer, de diffuser principalement par le biais du net et des réseaux sociaux. Y'a plus qu'a transmettre la vérité qui se cache derrière, à informer un max de gens, qui vont ensuite informer autours d'eux...
      Y'aura toujours des petits moutons qui se laisseront avoir, ou qui continuerons de nourrir le système des lobbys, parce que c'est plus rassurant pour eux... C'est sûr que c'est débile, mais là encore faut pas se laisser aller à la fatalité, ça doit pas nous empêcher de taper du poing contre ce système.

      Bref, je m'emporte un peu, mais c'est très évident, en fait, y'a un moyen de parvenir à nos fins, que ce soit pour les droits des animaux comme pour le reste, c'est juste de ne pas baisser les bras et de continuer d'y croire. ^^

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